La Syrie tardo-antique : zone périphérique contestée
Tout au long de l’Antiquité, la Syrie ancienne (qui englobe la Syrie actuelle, le sud-est de la Turquie et le nord du Liban) fut une zone hautement contestée. Que ce soit en tant que zone frontalière entre empires (Ebla, assyrien, babyloniens, perse, etc.) ou en raison de ses importantes ressources — sa position la plaçant stratégiquement au confluent de plusieurs routes commerciales nord-sud et est-ouest, dont la fameuse « Route de la Soie » —, son importance géopolitique était indéniable (pensons, par exemple, aux 116 forts répertoriés par Antoine Poidebard dans son ouvrage en 1934 et aux 396 forts et forteresses de plus identifiés par les chercheurs Casana, Goodman et Ferwerda dans leur article en 2023, qui sont situés entre l’ouest de la Syrie et le nord ouest de l’Irak, soit en grande partie la région qui nous intéresse). Deux millénaires plus tard, cette région est toujours au centre des rivalités géopolitiques au Proche-Orient.
Cette étude tentera de mettre en lumière les différentes stratégies politiques et militaires déployées par les empires au fil du temps pour sécuriser et contrôler cette région, afin d’éclairer et d’expliquer les enjeux géopolitiques qui font écho à ceux observés à notre époque. Ce projet de recherche se concentrera sur le cas de la Syrie tardo-antique comme frontière et zone contestée entre l’Empire romain d’Orient et l’Empire perse sassanide, dont le centre de gravité politique se trouvait en Irak actuel. L’importance de la Syrie, au cœur de la rivalité romano-perse, est également attestée par l’activité de construction romaine et par l’édification de nombreux ouvrages fortifiés (pensons, par exemple, à la « route de Dioclétien » ou Strata Diocletiana, édifiée à partir de la fin du IIIe siècle, et qui relia l’Euphrate à Damas). Cette recherche se bornera à la période allant de la fin du IIIe siècle jusqu’au début du VIe siècle de notre ère, soit de l’accession de l’empereur Dioclétien en 284 jusqu’à la mort de l’empereur Justinien Ier en 565. Cette période correspond, en amont, avec la montée de la dynastie sassanide, d’une part, et en aval, avec l’effondrement graduel de l’influence romaine au Proche-Orient.